Le double fardeau des inégalités et des risques de catastrophe

En cette Journée internationale, nous examinons de plus près le lien entre les inégalités, la résilience aux catastrophes et le besoin urgent de solutions équitables. Rejoignez notre discussion avec Hélène Jacot des Combes, la nouvelle chef de projet au Conseil international des sciences, alors que nous discutons de la dynamique complexe en jeu entre inégalités et catastrophes.

Le double fardeau des inégalités et des risques de catastrophe

L'objectif de cette année Journée internationale pour la réduction des risques de catastrophe, sur le thème « Combattre les inégalités pour un avenir résilient », vise à aborder la relation complexe entre pauvreté, inégalités et catastrophes. Cette journée vise à sensibiliser au cercle vicieux qui entoure les inégalités et les risques de catastrophe. La pauvreté, la discrimination et les inégalités contribuent toutes aux risques de catastrophe et sont exacerbées par ceux-ci, car les communautés vulnérables et marginalisées sont touchées de manière disproportionnée, ce qui, à son tour, aggrave les inégalités.

Pour approfondir la question, l'ISC a rattrapé son retard Hélène Jacot Des Combes, son nouveau chef de projet pour la définition des dangers et les profils d'information sur les dangers.

Avec une formation en paléoocéanographie, Hélène a passé une décennie à étudier les changements historiques des océans avant de consacrer 15 ans au changement climatique et à la gestion des risques de catastrophe dans les petits États insulaires du Pacifique. Son travail a duré huit ans aux Fidji et cinq ans aux Îles Marshall, impliquant des recherches, des formations, des enseignements et une collaboration avec les décideurs.

Elle a récemment rejoint le Conseil scientifique international en tant que chef de projet responsable de la révision et de la mise à jour du définitions des dangers et associé profils d'informations sur les dangers – une collaboration entre l'ISC et le Bureau des Nations Unies pour la réduction des risques de catastrophe, visant à améliorer la compréhension des dangers et à faciliter le partage d'informations en utilisant une terminologie standardisée.

Examen de la définition et de la classification des dangers : rapport technique

Le rapport technique UNDRR/ISC Sendai Hazard Definition and Classification Review fournit un ensemble commun de définitions de danger pour le suivi et l'examen de la mise en œuvre qui appelle à « une révolution des données, des mécanismes de responsabilisation rigoureux et des partenariats mondiaux renouvelés ».

La Journée internationale pour la réduction des risques de catastrophe de cette année met l'accent sur le rôle des inégalités croissantes dans l'augmentation des risques et de la vulnérabilité aux catastrophes. Pourriez-vous expliquer le lien entre les inégalités et les risques de catastrophe et discuter des stratégies potentielles pour résoudre ce problème ?

HJDC: Lorsqu'un aléa affecte une population, l'impact n'est pas uniforme ; cela varie en fonction des ressources et de la vulnérabilité des individus. Les personnes les plus vulnérables subiront des effets plus graves lors d’une catastrophe et mettront plus de temps à s’en remettre. Il est donc crucial de veiller à ce que tous les individus soient le moins touchés possible et aient la possibilité de se rétablir.

Bien entendu, les inégalités jouent un rôle important dans ce contexte, se manifestant de diverses manières. Un aspect est l’exposition ; les personnes disposant de moins de ressources vivent souvent dans des zones à haut risque, car celles qui ont plus de moyens ont tendance à éviter ces zones. La sensibilité est un autre aspect, les personnes ayant des revenus ou des économies limitées étant plus touchées. De plus, la capacité d’adaptation est influencée par les ressources, car les individus sans ressources ni accès à l’information ont du mal à se préparer et à réagir efficacement. Les inégalités ne créent pas de dangers, mais elles influencent profondément la façon dont les gens les vivent et y réagissent. Par conséquent, la réduction des risques de catastrophe doit tenir compte à la fois des aléas et de la préparation et de la réponse des populations vulnérables. La réduction de la pauvreté et des inégalités devrait faire partie intégrante de cet effort.

Compte tenu des disparités mondiales en matière de vulnérabilité aux risques et catastrophes liés au climat, en particulier dans le cas où les pays du Sud sont touchés de manière disproportionnée, quels mécanismes peuvent garantir la justice climatique et une adaptation équitable à l’échelle mondiale ?

HJDC: Des mécanismes sont en place, mais le défi réside dans leur mise en œuvre efficace. Par exemple, nous sommes actuellement à mi-chemin du cadre de Sendai, et le rapport de l'ISC pour l'examen à mi-parcours du cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe donne un aperçu de ce qui a été accompli et de ce qui reste à faire. En plus de remédier aux disparités de ressources entre les pays et les régions, nous devons donner la priorité à l’inclusion des praticiens, acteurs et scientifiques locaux dans le renforcement des capacités et la coproduction de connaissances. L’expertise locale fait souvent défaut, car la plupart des travaux sont menés par des chercheurs externes, qui peuvent répondre à des préoccupations immédiates mais sont moins durables à long terme.

Rapport pour l'examen à mi-parcours du Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe

Le rapport identifie les réalisations en matière de réduction des risques de catastrophe (RRC) depuis 2015 dans le cadre du cadre de Sendai, met en évidence les principales lacunes de mise en œuvre et fournit des orientations dans le but d'aider au développement d'un cadre de gouvernance au-delà de 2030 qui intègre la réduction des risques comme facteur clé du développement durable.

Une approche globale est nécessaire, car les inégalités sont liées au développement durable et à l’adaptation au climat. La combinaison de ces aspects sous le même toit peut s’avérer plus efficace, en particulier pour les régions du Sud aux ressources limitées. Nous devons également cesser de nous concentrer uniquement sur des événements spécifiques pour adopter une approche systémique. La note d'information sur les risques systémiques de l'ISC souligne la nécessité de prendre en compte l'ensemble du système entourant les dangers et les catastrophes, y compris la réduction des inégalités. Les déficits de données et d’informations dans les pays du Sud sont également préoccupants, car nous manquons de systèmes complets de suivi des événements, d’actions de réduction des risques et de stratégies de réduction des inégalités. Nous devons surmonter ces défis et adopter des approches plus globales et intégrées, car les ressources limitées des pays du Sud nous obligent à éviter les doubles emplois et le gaspillage des ressources.

Couverture de la note d'information sur le risque systémique

Risque systémique

Cette note d'information représente une perspective intégrée de la science et de la pratique des risques climatiques, environnementaux et de catastrophe concernant le risque systémique. Il donne un aperçu des concepts de risque systémique qui ont évolué au fil du temps et identifie les points communs entre les terminologies et les perspectives associées au risque systémique utilisées dans différents contextes.

Compte tenu des récentes catastrophes en Libye, au Maroc, en Afghanistan, en Syrie et en Turquie, pourquoi le thème de cette année est-il particulièrement important ? Comment envisagez-vous l’avenir de la réduction des risques de catastrophe face à l’augmentation de la fréquence et de la gravité des catastrophes ?

HJDC: Les récentes catastrophes dans ces régions mettent en évidence l’impact disproportionné sur les populations vulnérables. Les inégalités deviennent criantes, alors que ceux qui ont moins de ressources peinent à construire des logements résilients, s’installant souvent dans des zones à haut risque. Cela souligne la nécessité cruciale de systèmes d’alerte précoce améliorés. Pour y parvenir, il faut une approche globale, englobant la surveillance des dangers, la surveillance des infrastructures, une communication efficace et garantissant que les messages sont compréhensibles et exploitables, même pour ceux qui ont une éducation limitée.

Pour cela, la formation et le renforcement des capacités communautaires sont des éléments essentiels. De nombreux outils sont déjà disponibles, comme les codes du bâtiment et les politiques de zonage, mais leur accessibilité doit être garantie pour tous, même pour ceux qui disposent de ressources limitées. Il est essentiel de mettre en place des mécanismes permettant aux gens d’accéder à un meilleur logement, même s’ils ne disposent pas de fonds initiaux. En rendant ces outils accessibles, nous pouvons réduire les vulnérabilités des communautés marginalisées et promouvoir une réduction équitable des risques de catastrophe.

Y a-t-il un message spécifique ou un appel à l'action que vous aimeriez transmettre au public de l'ISC en cette Journée internationale pour la réduction des risques de catastrophe ?

HJDC: Je tiens à souligner que la réduction des risques de catastrophe est une responsabilité collective. De nouveaux outils, comme les profils d’information sur les dangers, sont en cours d’élaboration pour normaliser et rendre l’information plus accessible. Ces outils sont utiles à divers partenaires et communautés pour renforcer leurs capacités. Mais chacun peut contribuer en étant mieux préparé et informé. Toutefois, la coordination et l’échange d’informations entre les différents acteurs sont essentiels.

La science joue un rôle central dans cette entreprise. Nous ne devrions pas craindre la science ; c'est pour tout le monde. Nous pouvons tous faire une différence, et la science est un outil précieux pour y parvenir. La clé n’est pas seulement de produire des connaissances scientifiques, mais aussi de garantir qu’elles soient utilisées efficacement, en comblant le fossé entre la science et l’élaboration des politiques. Une meilleure communication, coordination et utilisation scientifique sont essentielles à une réduction efficace des risques de catastrophe.

Combler le fossé entre la science et la pratique au niveau local pour accélérer la réduction des risques de catastrophe

Cette note d'orientation analyse l'écart existant entre la science et la technologie (S&T) et son intégration dans la gestion des risques de catastrophe au niveau local.


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Photo par Jonathan Ford on Unsplash

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